L’exposition

Cet ensemble foisonnant de projets témoigne d’une immense capacité d’analyse et d’invention, déployée par des équipes d’architectes expérimentées autant que par des architectes en formation, autour d’une question stimulante et difficile – l’architecture des écoles primaires – aussi essentielle que maltraitée par les politiques éducatives depuis des décennies.

N’ayant pas fait l’objet de concours depuis plus d’un demi-siècle, la problématique des édifices scolaires a refait surface depuis quelques années. Elle avait été introduite, dans la foulée du rapport Parent, par un concours pour les écoles primaires en 1964. Par la suite, la situation a été cristallisée avec des approches gestionnaires ou des réponses technologiques misant sur l’industrialisation de la construction des écoles. « Les gouvernements successifs n’ont visiblement pas fait leurs devoirs d’architecture », dit le commissaire de l’exposition. « La fermeture des écoles imposée par la pandémie en 2020 a montré l’importance de la dimension humaine de la pédagogie, dimension que ne parviennent pas à transmettre les écrans de la technologie. Elle a également révélé par défaut – aux enfants, aux éducateurs comme aux parents – que l’école est un ensemble de lieux physiques précieux et irremplaçables ».

Contredisant les tendances à la normalisation et à la standardisation des lieux éducatifs, la mise en parallèle des différents concours révèle que l’architecture des écoles primaires ne devrait pas être circonscrite dans des modèles à répéter quel que soit le contexte urbain. En invitant à de multiples comparaisons entre les sites, entre les attentes des différents acteurs, ainsi qu’à une exploration de la variété des propositions architecturales, le parcours proposé permet de considérer l’école comme un lieu d’apprentissage de ce rapport complexe au vivre-ensemble qui a pour nom l’urbanité.

Structurée autour de quatre grands thèmes, l’exposition aborde l’école dans ce rapport à l’urbanité. Car l’école est aussi une petite ville dans laquelle les lieux de rassemblement, les salles de classe, les emplacements collaboratifs et ceux qui permettent de cuisiner et de manger jouent un très grand rôle dans les diverses étapes de l’apprentissage.

À la différence des échanges virtuels par écrans interposés, les modes d’emploi des lieux d’apprentissage ne sauraient être standardisés. Leur conception appelle de nombreuses opérations de concertation qui doivent anticiper par la délibération, la meilleure architecture pour un contexte urbain donné. Tout cela, grâce à l’expertise et à la créativité des équipes de conception, ce qui constituera la meilleure disposition.

L’exposition ne prétend pas offrir de discours didactique par rapport à la question de l’école. Le dispositif scénographique va au-delà d’un simple résumé de toutes les phases de concertation et de conception associées aux concours. Il cherche à inviter le public à s’immerger visuellement et intellectuellement dans la complexité de la question. À chacun d’imaginer les intenses débats qui animent les jurys de concours.

Les concours et la concertation

Le point commun de tous les projets présentés est d’avoir été conçus en situation de concours. Cette démarche repose sur une culture de la démocratie participative et des modalités de jugement à la fois qualitatives et collectives. Puisqu’il ne saurait y avoir de client unique pour un programme d’école primaire, la concertation s’impose en amont et se prolonge tout au long du processus. Dans un concours, le « client » est toujours incarné par un jury constitué de représentants et d’experts des besoins et des enjeux.

De 2019 à 2020, plus de 160 projets professionnels, dont 20 finalistes, ont été soumis aux cinq concours du Lab-École, tandis que cinq équipes d’étudiants à la maîtrise ont été retenues pour projeter le futur des lieux environnant les édifices scolaires au centre-ville. L’exposition ne pouvant pas tout rassembler au Centre de Design de l’UQAM, il est important de souligner que tous ces projets ont été systématiquement documentés et sont accessibles en ligne sur la base de données du Catalogue des Concours Canadiens (www.ccc.umontreal.ca), sous la responsabilité du commissaire de l’exposition.

Photos de l’exposition – Crédit Dominique Viau

Notes biographiques du commissaire

Professeur à l’École d’architecture de la Faculté de l’aménagement de l’Université de Montréal, Jean-Pierre Chupin est titulaire de la Chaire de recherche du Canada en architecture, concours et médiations de l’excellence (www.crc.umontreal.ca). Il coordonne l’équipe interuniversitaire du Laboratoire d’étude de l’architecture potentielle (LEAP). Ses recherches sur la comparaison analogique ont été rassemblées dans Analogie et théorie en architecture : de la vie, de la ville et de la conception, même, réédité en 2013 aux éditions suisses Infolio. Rédacteur en chef du Catalogue des Concours Canadiens / Canadian Competitions Catalogue, il a codirigé Architecture Competitions and the Production of Culture, Quality and Knowledge: An International Inquiry en 2015. Il a dirigé le premier ouvrage couvrant soixante-dix années de l’histoire des concours au Canada en 2016 : Concourir à l’excellence en architecture : éditoriaux du Catalogue des Concours Canadiens (2006-2016), paru en anglais en 2017. En 2020, en collaboration avec G. Stanley Collyer, il a publié en accès libre sur le site de la CRC-ACME : Young Architects in Competitions: When Competitions and a New Generation of Ideas Elevate Architectural Quality). Avec une vingtaine de chercheurs d’universités canadiennes, il construit actuellement l’Atlas de l’Excellence en Architecture à partir d’un inventaire historique de plus de 6 000 réalisations primées au Canada (https://architecture-excellence.org).

Le Lab-École

Fondé en 2017, le Lab-École est un organisme à but non lucratif qui s’est donné comme mission de rassembler une expertise multidisciplinaire pour concevoir les écoles de demain. Sous l’impulsion de ses trois membres fondateurs, Pierre Thibault, Pierre Lavoie et Ricardo Larrivée, le Lab-École entend mobiliser cette réflexion collective pour en faire un projet de société. Comment? En joignant le savoir du personnel enseignant à celui de spécialistes d’autres horizons pour créer les meilleures écoles du Québec, celles qui favorisent pleinement le bien-être des élèves et de tous ceux qui gravitent autour d’eux.

Le Lab-École est un catalyseur d’initiatives innovantes en matière d’environnement physique, de mode de vie sain et actif et d’alimentation à l’école. Conformément à l’esprit « laboratoire », son fonctionnement est ouvert et flexible, axé sur l’exploration et l’expérimentation. Le Lab-École mène ses interventions en étroite collaboration avec chaque équipe-école et sa communauté. Le Lab-École a soutenu la mise en œuvre du premier concours d’architecture dans le monde scolaire depuis 50 ans.

Le Laboratoire d’étude de l’architecture potentielle (LEAP)

Anne Cormier est architecte, cofondatrice de l’Atelier Big City et professeure à l’Université de Montréal. Elle est membre du LEAP. Ce laboratoire, qui regroupe douze chercheurs des quatre universités montréalaises, a contribué à former plus de 180 chercheurs de la relève. À la croisée des disciplines de l’architecture, de l’histoire de l’art, du design et de la sémiotique, ce programme de recherche considère l’architecture des lieux du point de vue de la potentialité des projets, c’est-à-dire du point de vue des processus de conception et de leurs médiations sociales et culturelles et non uniquement du point de vue des édifices construits.

Exposition conçue par le Centre de design de l’UQAM avec le soutien de nos partenaires. La direction scientifique de l’exposition a été confiée à Jean-Pierre Chupin qui a bénéficié de la précieuse collaboration d’Alexandra Paré, professeure des écoles primaires et doctorante en architecture.

Logos des partenaires de l'exposition "Devoirs d'architecture" : Centre de design; UQAM | École de design; Lab-École; Université de Montréal; CRC-ACME; LEAP; MP; V2com